Des murs et des basses
Je ne connaissais pas Le Gros Corbeau. Juste un nom attrapé au vol, dans une conversation de comptoir, ou sur une affiche collée de travers. Hier soir, c’est là que je me suis retrouvé, presque par hasard, pour un concert dans le cadre du festival Les Nuits de la Nef.
Pas à La Nef elle-même — mais dans ce petit bar-jeux niché place du Palet. Ce détail a son importance. Parce que c’est justement le propos de cette édition : faire sortir la musique de ses murs, l’envoyer résonner ailleurs, dans des cafés, des garages, des recoins de la ville.
Sur scène, le duo Zombie Dog : une bassiste, une batteuse. Deux filles, pas de guitare. Mais un son plein, nerveux, dense. Une cinquantaine de personnes dans la salle, épaule contre épaule, bière à la main.
Et dans cette chaleur, cette vibration — un souvenir m’a traversé. Mes premières répétitions, à la fin des années 2000. La Nef, à l’époque. Les salles de répètes, la batterie d’emprunt, les doigts qui apprennent encore. Juste l’envie, la tension, le besoin d’en découdre avec quelque chose.
Hier soir, j’ai retrouvé ce frisson-là. Non pas par nostalgie, mais parce qu’il était encore là, intact.
Alors je me suis demandé : pourquoi faut-il un festival pour que la culture prenne ce risque ? Pourquoi reste-t-elle si souvent enfermée dans ses enceintes, dans ses logiques de jauge et de billetterie ? Et si, finalement, l’expérience la plus précieuse n’était pas dans les grands noms à l’affiche, mais dans ces instants minuscules où la musique nous retrouve — là où on vit vraiment ?