Voix de retour

Rue de Beaulieu, un morceau de ville en veille

image C’est un petit article, dans les pages locales de la Charente Libre. Un commerçant ferme boutique, excédé par l’insalubrité, les incivilités, l’inaction. Encore un. Il aurait pu passer inaperçu. Mais cette fois, l’article me parle directement. Parce qu’il s’agit de la rue de Beaulieu. Ma rue d’enfance.

Je l’ai arpentée des centaines de fois, gamin, entre l’école René Defarge, le collège Jules Verne et le lycée Guez de Balzac. C’était le passage obligé. Le cœur battant du Vieil-Angoulême. Une rue de traverse, vivante, populaire, modeste. Une rue qui racontait quelque chose de la ville, dans ses pavés comme dans ses vitrines.

Aujourd’hui, elle semble éteinte. Les commerces ferment, les rideaux rouillent, les incivilités s’installent, et l’amertume prend racine. Richard Sidelsky, horloger passionné, jette l’éponge. Non pas faute de clients – il en avait, même de Paris. Mais faute de cadre. Il parle de vitrine vandalisée quatre fois en trois ans, de poubelles sorties à toute heure, de stationnement incohérent, d’un manque de vision d’ensemble. Et il n’est pas le seul.

La rue de Beaulieu meurt à petit feu, dans l’indifférence quasi générale.

Et pourtant, cette situation n’est pas une fatalité. Elle est le symptôme d’un aménagement urbain dépassé, pensé sans cohérence, sans projection, sans courage politique. Je ne suis pas urbaniste, mais j’ai une certitude : on ne sauvera pas les centres-villes avec des demi-mesures.

Il est temps d’ouvrir, enfin, une réflexion à la hauteur, qui dépasse le simple cas de la rue de Beaulieu. Une réflexion sur les mobilités, sur les circulations piétonnes, cyclables, automobiles. Sur les usages mixtes des quartiers. Sur la ville vivante contre la ville vitrine.

Pourquoi ne pas lancer un grand plan de circulation pour Angoulême, ouvert, concerté, transparent, qui intégrerait la question de la piétonnisation dans un schéma global ? Pourquoi ne pas faire de la rue de Beaulieu un laboratoire de renaissance urbaine ? Elle le mérite. Nous le méritons.